Lundi, le Procureur en charge du procès de l’inculpé, Thomas Lubanga, a déclaré qu’en plus de la conscription de jeunes garçons pour les faire combattre lors du conflit sanglant dans la région de l’Ituri, le chef de milice congolais a également enlevé des jeunes filles afin de les utiliser comme esclaves sexuelles.
Bien que la Cour pénale internationale (CPI) n’ait pas inculpé Lubanga de crimes de violence sexuelle, le Procureur en chef, Luis Moreno-Ocampo, y a consacré une partie de son exposé introductif.
Il a indiqué que le viol et l’esclavage sexuel sont devenus le lot quotidien des filles kidnappées, également utilisées comme combattantes et aides domestiques dans les camps d’entraînement de la milice de Lubanga.
Il a ajouté que les garçons soldats étaient contraints de violer des civils ou de punir les jeunes filles enlevées désobéissant aux ordres.
« Un [jeune garçon] soldat a été très traumatisé après avoir tué une fille refusant d’avoir des rapports sexuels avec un commandant », a déclaré Moreno-Ocampo. « Vous apprendrez que dès que les jeunes filles commençaient à avoir de la poitrine, les commandants de Lubanga pouvaient les contraindre à servir de conjointes et faire de celles-ci leurs esclaves sexuelles ».
Moreno-Ocampo a précisé qu’il était investi d’une « mission » : démontrer la responsabilité pénale de Lubanga pour les « atrocités perpétrées contre ces petites filles soldats ».
Désormais rejetées par leurs communautés, les jeunes filles continuent à souffrir, a-t-il indiqué, et elles ne sont souvent pas retenues pour les projets de réintégration.
« Le jugement que vous rendrez dans cette affaire est susceptible de changer la vie de ces filles », a déclaré Moreno-Ocampo en s’adressant aux juges. « Elles ne seront pas des laissées-pour-compte devant la Cour pénale internationale ».
Le procès de Lubanga est unique à plus d’un titre : d’une part il s’agit du premier procès de l’histoire de la CPI et, d’autre part, la présence des victimes et de leurs avocats y est autorisée. Qui plus est, les victimes auront peut-être l’opportunité de faire part de leurs expériences à la Cour.
Les exposés introductifs des avocats des victimes ont également mis l’accent sur le viol de filles soldats enlevées, certaines à peine âgées de 12 ans.
Carine Bapita, avocate au barreau de Kinshasa, représentant cinq jeunes victimes de sexe féminin, a soulevé que « ces filles soldats ont été victimes de viols dès leur enlèvement ».
Elle a affirmé devant la Cour que « la plupart d’entre elles souffrent d’un traumatisme psychologique ». « Certaines ont été torturées. Le viol en tant qu’arme de guerre déchire [les familles] et rompt les liens culturels et sociaux. Leur enfance leur a été volée et elles n’ont eu droit ni à la scolarisation, ni à la sécurité, ni à une santé génésique, ni à une autonomie sexuelle ».
Mardi, ce sera au tour de Me Catherine Mabille, avocate de Lubanga, de présenter sa plaidoirie introductive. Celle-ci devrait porter sur l’accusation de violence sexuelle et de réduction en esclavage, aucune de ces charges n’étant reprise dans l’acte d’accusation.